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quelque chose devait déshonorer l’abbaye, il livrerait plutôt ses deux cent-soixante moines au bûcher. Or, elle n’ignorait point que le pire scandale eût été apporté par elle. Et ce lui était en sus une raison de s’irriter que de penser à la nécessité inéluctable qui l’avait conduite.

Ce qui rongea en sus cette volonté, restée païenne sous l’apparence de la foi, ce fut justement cette fatalité qui venait de la conduire au fond de la fosse où elle mourrait peut-être, à moins qu’un supplice plus décoratif ne lui fût offert.

Elle n’avait jamais eu l’intention de mentir. Elle était entrée dans ce couvent avec une âme simple et fraîche, et par le seul désir d’échapper à la meute qui la chassait dans la forêt. Plus tard, si elle avait dissimulé son sexe avec soin, c’est qu’elle était en somme heureuse et ne commettait par lui nul acte répréhensible.

Nulle hypocrisie n’était donc venue salir le mobile de ses actes. Et elle vivait en homme sage jusqu’à ce que le maudit Gontram vint la surprendre et la vaincre. Voilà la vérité.

Pourtant, elle le savait, rien ne pouvait plus arrêter la marche d’un châtiment inexorable. Le savant Raban Maur, qui, depuis des années, ne pensait qu’aux péchés et à leurs punitions ne laisserait pas impuni le crime