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qui avait déjà donné à cet être tant de preuves d’affection singulière, en lui apportant, et l’intelligence et la beauté, voulût édifier encore le monde en faisant de lui un saint.

Et une magnétique influence entoura Ioanna dont nul sans doute ne soupçonnait le vrai sexe. Naguère, sous des vêtements militaires, les caractères de sa beauté physique eussent été plus apparents que désormais. Elle portait une large et lourde robe d’étoffe raide, aux plis majestueux, sous laquelle rien ou presque rien du corps ne transparaissait.

Et les jours passèrent, puis les mois, dans une douceur coite. Frère Ioan devenait le favori de l’Éminentissime abbé Raban Maur, qui le prenait comme secrétaire pour dresser ses catalogues de péchés.

Car Raban Maur voulait imposer à toute la Chrétienté un répertoire unique des crimes contre Dieu et des peines qui les châtient. Il dictait donc à Ioanna ce que Dieu, en son équité, lui révélait de ses volontés devant les fautes humaines.

Et la jeune fille apprenait ainsi, elle qui, jusque-là, était pure et sans vices, toutes les choses immondes que les hommes commettent contre la volonté du Créateur.

Souvent elle demandait à l’abbé le sens de tant de péchés étranges qui ne pouvaient être absous à moins d’années de pénitence.

— Ô mon père, d’où vient que celui-ci