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Enfin l’orgueil d’appartenir à une race qui sut toujours raisonner et agir le fouetta. Il tira son coutelas et sépara le nouveau-né de la mère.

Avec un brin de cordelle il ficela le cordon ombilical, maladroitement, mais d’une main ferme.

Il se pencha vers l’accouchée. Les yeux fixes se ternissaient déjà.

Alors en gestes prompts, il découpa dans le vêtement de la morte un morceau d’étoffe puis enveloppa le nouveau-né qui jetait par instant un petit cri. Il dit en grec le mot d’adieu et sortit du chariot.

Reprenant sa lance sans plus s’attarder, il passa le mur de pieux en un lieu ruiné un peu plus loin et se hâta à travers la forêt.

Il tenait précieusement son petit fardeau. Le cœur lui battait à l’idée que peut-être ne saurait-il pas préserver cette humble vie, vouée sans lui à s’éteindre en naissant. Il courut.

Autour de son pas, le silence se répandait, eût-on dit, sous les pins et les bouleaux. Il progressait sur une terre feutrée et sinistre. La nature, indifférente à la vie et à la mort, continuait à répandre sa mélancolie pêle-mêle avec ses joies sans doute. Et, retrouvant pour cela des mots helléniques, le soldat priait en même temps la déesse qui préside aux nativités de garder intacte