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étaient venus jusque-là pour surprendre les hommes de Carloman ou de son fils. Ils en égorgeaient trois ou quatre, les dépouillaient et prenaient la fuite en riant sauvagement.

Et c’est bien pour cela que l’Empire était toujours sous les armes et que des évêques nombreux allaient sans cesse catéchiser cet ennemi indomptable dont, paraît-il, le royaume s’étendait pendant des journées et des journées de marche, jusqu’aux pays étranges où la terre est stérile et où la neige tombe même en été.

Le limes ancien, à trente pas, s’arrêtait au bord d’un talus. En contre-bas passait un chemin ou plutôt une piste aux profondes ornières. C’était le chemin suivi par les soldats de l’Empereur, lorsqu’ils allaient guerroyer le long du Rhin et au delà.

Sur ce chemin, le soldat vit venir, au pas lent et hésitant d’une bique épuisée, menée par une sorte de nain semblable à un écureuil, un char clos et pauvre, dont les roues pleines faisaient jaillir la boue en avançant.

Il se pencha avec curiosité. Il était d’une race qui aime passionnément tout ce qui est inattendu, tout ce qui surprend, et tout ce qui sent le mystère.

À ce moment un cri sauvage et aigu jaillit de l’intérieur du sinistre char.

Et la plainte s’étendit, roula, parut sauter jusqu’au ciel…