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depuis lors ils vagabondaient à travers les pays barbares. Le dernier maintenant était soldat dans la garde de l’Empereur Louis.

Avec lui cette fois, le nom et le souvenir d’Hellènes qui avaient été le plus haut sommet de la puissance et de l’esprit : les Bactriades, s’éteindrait à jamais…

Le soldat se passa la main sur le front. Autour de lui le vent jetait à travers les ramilles une plainte triste. Le ciel roulait, pêle-mêle, des nuages lourds et gris. À la frontière qu’il gardait en ce moment s’étaient heurtés jadis bien des hommes illustres que depuis des siècles le monde avait oubliés. Les pieux du limes, ici et là, ruinés ou abattus, couverts de végétation et engloutis à demi par la terre, figuraient donc bien le destin des humains. Aujourd’hui, fiers, ils barrent le chemin à leurs ennemis, et certes les dominent…

Mais, demain, ils pourriront à leur tour et bientôt leurs traces elles-mêmes disparaîtront, comme s’ils n’avaient jamais existé.

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À ce moment, le soldat entendit un bruit sourd et lent sur sa gauche.

Il se leva, remit son casque et prépara sa lance. Il avait un devoir, et, s’il le fallait, combattrait contre l’arrivant. Que de fois des troupes de soldats saxons aux cheveux longs, aux vêtements de fourrure à peine écharnée, aux armes étranges et dangereuses,