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dont elle ne verrait pas le visage. Un de ses fidèles, une brute épaisse, assassin dévoué qui, en quittant la demeure papale, risquait toujours de se faire pendre, mènerait l’empoisonneuse dans la pièce où Ioanna, après l’avoir reçue d’abord, se serait étendue, masquée, et offrirait son corps nu pour se voir enfin séparée de l’enfant qui l’accablait.

Ce parti pris lui donna le repos de l’esprit. Il ne fallait plus attendre que le surlendemain. Son fidèle savait la demeure de l’empoisonneuse et la surveillait. Il l’amènerait lui-même, dès l’aube, quand tout dort à Rome.

Ce soir-là, enfin, elle serait redevenue maîtresse de son avenir. La nuit passa. Ioanna ne dormit que quelques minutes. Un rêve affreux la tourmentait. Elle s’y voyait brûlant aux flammes de l’Enfer, avec, dans sa chair, un long morceau de fer chauffé au rouge qui jamais ne refroidissait. Cela lui apportait un tourment si affreux qu’à l’imaginer la sueur coulait sur son visage et les ongles de ses mains entraient dans sa peau.

Enfin le soleil se leva. Le lendemain, à pareille heure, elle serait délivrée. Cependant, on hâtait tous les préparatifs de la procession qui avait lieu avant le milieu du jour.

Ioanna, lasse et anxieuse, se serra fortement le corps dans une pièce d’étoffe mince et solide, but deux verres d’un alcool violent