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casaque, l’arc était attaché, haut levé, de sorte qu’on pût le prendre d’un seul geste, par-dessus la tête. Sous l’aisselle gauche se tenait l’étui aux flèches, penché en avant.

Le soldat avait quitté son casque, qui reposait près de lui sur le sol. Il portait une face mélancolique et brune, lasse quoique encore dure, mais pleine d’une sorte de fierté. Il chantonnait dans une langue plus douce et harmonieuse que celle de ce pays germanique, près du Rhin, où, depuis plus d’un demi-siècle, le maître de l’Occident, vivait entre de lointaines expéditions. Au loin, la forêt s’étendait de tous les côtés comme une sorte d’océan vert. Une forêt peu dense et sinistre, où, durant l’hiver, les ours et les loups devaient être rois. Mais le songeur savait que derrière lui, dans un fond, au bord d’une rivière paisible et poissonneuse, le village occupé par sa troupe reposait. Il se nommait Engelhem. Et plus loin, vers le nord, se trouvait Mayence, la splendide capitale où avait vécu si longtemps le grand empereur Carloman.

Le soldat songeur se souvenait de cet homme puissant et bon, qui gardait une inépuisable ressource de haine contre les Germains de l’autre rive du grand Rhin : les Saxons. Il avait servi sous ses ordres. L’Empereur l’aimait parce qu’il savait lire et écrire. Puis, un mystère planait sur son origine et