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ter un âne ou de payer son voyage dans une société de gens gagnant Rome.

Elle préféra acheter l’âne ; il était d’ailleurs harnaché à souhait et visiblement sortait des mains d’un voyageur d’Église. L’enfourchant et le menant à coups de pied, elle fut bientôt hors de la ville. Des huées l’accueillirent ça et là, et elle craignit une fois que des soldats ne lui fissent la mauvaise plaisanterie de l’arrêter pour joqueter, mais enfin elle finit, sans malheur, par se trouver seule dans la campagne emplie de soleil et elle pressa sa monture. Celle-ci s’attestait sans faste, mais par chance obéissante.

Le troisième jour elle reconnut l’endroit où ses vêtements ecclésiastiques étaient cachés, descendit de son âne, attendit que fussent en avant, et loin, quelques voyageurs et paysans ironiques, puis retrouva son costume.

Elle le revêtit, mit à la place sa vêture galante et repartit. Avec la perruque rousse en moins, son visage mâle reprenait une gravité nouvelle et personne ne soupçonna rien quand elle descendit dans une auberge pour y coucher et souper.

Et comme l’aubergiste lui disait, en manière de conversation, qu’on était très anxieux de la disparition du nouveau Pape, qui eût dû se trouver à Rome, Ioanna dit :

— C’est moi.