Page:Dunan - La Papesse Jeanne, 1929.djvu/201

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Enfin, on l’accusa d’amasser l’or.

Elle laissait dire, vivant seule et attentive à ne rien laisser deviner de ses pensées secrètes. Comme tous les incroyants, elle marquait avec un tel soin les observances religieuses qu’on ne pouvait établir non seulement aucune preuve des calomnies colportées, mais encore aucune justifiable présomption de leur vérité. Personne ne soupçonnait qu’elle fût femme.

Les mois coulèrent.

Un jour, les Normands remontèrent le Tibre et apparurent devant Rome.

Ce fut dans la débâcle entraînée par cette venue des féroces conquérants, qui tant terrifièrent déjà le grand Empereur Carloman, que Ioanna courut un grand danger et en fut sauvée. Cela advint un matin de juin. Ioanna venait de se lever. Nue et sereine, elle procédait à ses ablutions car de sa vie païenne il lui restait, outre des acquets intellectuels, un grand goût de propreté physique.

Mais un moine qui vivait près d’elle se rua sur sa porte en criant :

— Frère Ioan, vite, sauvez-vous. Les Sarrasins !

Mais le moine hébété se vit devant une femme, une femme qui était le fameux professeur et prochain évêque tant révéré. Il eut un cri d’horreur, crut voir le diable, et