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— Ô dis-moi, murmurait-elle en soupirant de volupté, crois-tu, mon maître que le monde ait eu un commencement ?

— Le passé est un aspect du présent, comme l’avenir.

— Mais nous-mêmes, sommes-nous éternels dans l’axe du temps ?

— Sans doute.

— Est-ce-là notre fonction en tant qu’individualités, qui le fûmes, puisque pourtant la conscience n’en est pas dans notre esprit ?

— C’est que la conscience n’est pas le moi. Nous sommes en notre essence hors et au delà de la conscience.

— Mais, en ce cas, si je n’ai pas conscience de tout ce que je suis, ne puis-je pas être toi ?

— Si certes.

— Ne puis-je pas être Dieu ?

— Qui le niera.

— Ne puis-je pas être le monde ?

— Nous sommes tout cela ô Ioanna ! Notre personne n’est rien qu’une tangente de l’infinitude. Mais tous les êtres ne sont qu’un être et l’univers se confond avec lui.

— Alors, chuchotait-elle, le monde jouit de mon plaisir.

Il riait et elle se pâmait, autant de délices que de pensées.