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de vivre avec ces Hellènes, oublieux du monde, qui évoluait barbarement autour d’eux. Elle joua à mille jeux charmants avec la sœur de son nouvel ami. Elle écouta leurs paroles, toujours justes et mesurées, s’efforçant de serrer le domaine des réalités avec rigueur.

On s’occupait, dans cette famille, de philosophie. Les manuscrits des penseurs les plus profonds y étaient présents, écrits d’un ancien graphisme sur des parchemins minces. Et Ioanna s’emplit l’esprit de ce tournoiement spirituel qui allait des thèses anciennes de Thalès à celles des derniers interprètes du Platonisme.

Ô merveille, elle vivait comme dans un rêve, au sein de si prodigieuses conceptions que parfois il lui semblait que ces savants eussent dépassé les virtualités humaines.

Et parfois, tandis que dans une salle fraîche donnant sur le portique, Ioanna méditait les écrits de Parmenide, le jeune Grec survenait et la baisait sur les lèvres. Ils conversaient lentement, touchaient les plus hauts problèmes de l’intelligence et s’aimaient en même temps. Nue, aux bras de son amant, la lointaine aventurière de Fulda s’abandonnait, dans un délire d’idées abstraites qui donnaient à l’amour une sorte de charme nouveau, métaphysique et souverain.