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de la ville où la prostitution avait ses assises.

On visita même, mais sans y regarder trop près, la demeure de la vieille maquerelle chez laquelle Ioanna se tenait cachée. Et ce fut un matin d’émotion redoutable, car l’exécution aurait certes suivi de près la découverte.

Aussi, pour remercier et servir celle qui l’hospitalisait, Ioanna fut-elle contrainte de se livrer aux hommes, avec une perruque et de faux tatouages sur la poitrine, pour faire accroire qu’elle fût du haut Nil.

Elle connut ainsi un chamelier qui réveilla, malgré le tragique des circonstances et leur humiliation, la volupté endormie dans son corps. Ioanna redevint celle qui, jadis, se tordait de délices sur les grabats de Fulda.

Aussi le chamelier, un homme du Hedjaz qui se prétendait parent du Prophète, demanda-t-il à Ioanna si elle voulait qu’il mît à mort le nègre.

— Mais pourquoi ? fit-elle.

— Parce qu’il te trahira. Il est déjà allé en secret chez un marchand de femmes qui les exporte à Byzance et je suis assuré qu’il voulait te vendre.

— Mais après ?

— Nous fuirons ensemble jusqu’en Égypte.

— Comment cela ?

— À dos de chameau.

Elle accepta. Deux heures plus tard,