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— Chez nous on se contente d’empaler, fit l’Arabe.

Ioanna, rassurée, et se sentant enfin libre, répondit :

— Tous les supplices sont hideux.

— Bah ! riposta l’autre, vivre est un supplice.

Il était ironique, froid et serein, la face dominatrice, avec sa barbe frisottante et ses durs yeux noirs.

Ioanna eut un frisson.

— Me voilà hors de son atteinte en tout cas.

— Oui, mais vous êtes à moi.

Elle eut un regard inquiet.

— Je suis votre ami, fit-elle, et les amis sont l’un à l’autre. Ne vous ai-je pas sauvé la vie.

— Si certes et je vous protégerai contre Dieu même, s’il le fallait. Mais vous êtes aussi une femme et je vous désire. Voilà pourquoi il m’est permis de vous dire à moi puisque je sais la chose telle…

Ioanna le regarda avec un étrange sentiment de honte cachée, un vague souvenir des voluptés connues jadis à Fulda entre les bras de Gontram, et une sorte de goût amer pour la défaite. Elle tourna ensuite la tête vers le flot infini et ses yeux s’emplirent de cette vastitude bleue sur laquelle le soleil vibrait. Quand elle revint vers le Sarrasin