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— Vous n’en prenez pas, Jean ?

Il savait que dans le peuple tout se traite le verre en main et devina qu’il serait très mauvais, orgueilleux et prétentieux de refuser.

Il alla chercher un verre et vint boire.

— Vous aimez cela, le porto, Jean ?

Il se prit à rire.

— Je n’en bois jamais.

— Comment, vous pouvez avoir à votre côté toutes ces bonnes choses sans y goûter ?

— Que voulez-vous, ma cousine. On désire surtout ce qui vous manque. Je désire bien des choses parfois, mais je vous assure que les vins et les gâteaux n’y jouent aucun rôle.

Elle eut un sourire triste.

— Bien sûr, moi, ce n’est pas de même.

Il fut touché au cœur par la plainte discrète enclose dans cette réflexion.

— Ma cousine, je ne veux vous dire rien de froissant. Moi, je donnerais souvent tout ce que j’ai pour être libre.

— N’êtes-vous pas libre ?

Il hocha la tête, incapable de donner une explication nette de ses sentiments. Il savait bien ce que c’est que cette liberté dont il rêvait au lycée en expliquant Homère ou Horace. Il n’aurait pourtant, par pudeur, pas voulu exposer en quoi il était l’esclave de ses