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vide, rythmiquement. S’il se laissait emporter, ses jambes agiraient seules. Il revit soudain, matérialisée une seconde dans les ténèbres, Lucienne Dué, sa cousine, qui en ce moment l’attendait, et s’offrait, là-bas, à lui…

IL voulut immobiliser la chère image : un corps mince, souple et délicat, qui se dévêtait avec un sourire pareil à une aube, et devant lequel il se mettait à genoux dans un délire affolé et mystique. Devenait-il fou ?

La question se posa hors de la conscience et vint jusqu’au seuil de la pensée motrice. Un instant Jean Dué sentit son esprit osciller sur un coupant de rasoir. D’un côté la démence, de l’autre… Mais n’était-ce pas la pire folie que de renoncer une minute de plus à ce corps espéré, ouvert là-bas sur le lit, témoin de l’entrée d’un jeune garçon parmi les hommes.

Renoncer ?… Ce mot tendit en lui toutes les forces de l’être. Quelque chose craquait pourtant encore en son âme. Un fil résistant que ses efforts passionnés avaient détruit toron à toron. Il sut ce que ce fil retenait lorsque enfin ses jambes agirent seules et le menèrent vers la porte, vers la rue, vers la route, vers Lucienne Dué. La haute conscience des Dué venait de mourir en lui…

Lucienne avait dit : ce soir…

Comme un ressort se débande, Jean Dué