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— Moi aussi ! dit Mme Dué.

Jean retint une forte envie de rire, en même temps que ces dernières paroles de ses parents le frappaient curieusement. Ainsi, dans la vie, il peut suffire de jeter un salut dans la rue pour se créer des amitiés et des protections puissantes… Mais dans ce jeu de relations, de lois interprétées et mises à la porte des plus forts, de richesses transmises et gardées par finesse, que deviennent donc la sincérité, la franchise, l’honnêteté et le talent ?…

Il demanda, pour que le sujet ne fût point abandonné :

— Quelle est notre parenté exacte, du moins théorique, avec les Dué du bord de l’eau ?

M. Dué répondit paisiblement :

— Qui peut le définir ? Ton bisaïeul, Tancrède-Antoine Dué, notaire royal, eut en 1768 un fils, Marcellin, qui lui vola de l’argent pour une fille. Le vol de fils à père est véniel selon la loi, mais moralement il est inexcusable. Le notaire fit arrêter son fils et la fille. Elle fut mise dans un couvent à cinquante lieues. Après six mois de détention, Marcellin se trouva libéré. On le croyait amendé, mais il courut enlever du couvent sa bien-aimée et revint vivre ici dans la petite maison du bord de l’eau, que tu sais, et qui n’a pas changé.

« Il avait un frère cadet, Irénée-Hugues Dué,