ordres, sa vie peut-être. Si vous aimez les jouissances excessives, madame, donnez-vous celle-là, il n’y en a pas de plus élevée.
Je ne songe pas, vous le pensez bien, à détruire l’amour, ni l’adultère, ni la galanterie, ni même la prostitution dans ce beau pays de France, qui leur doit le plus clair de sa célébrité : je ne nie pas non plus qu’il n’y ait, en dehors du mariage, de ces passions irrésistibles, fatales, qu’aucune loi ne peut combattre, qu’aucun raisonnement ne peut vaincre, qui emportent ceux et celles qui les subissent non seulement au delà des règles du monde, mais au delà même des bornes de la terre. Ces passions-là portent avec elles leur catastrophe, leur châtiment, leur renommée, leur pardon. Elles prennent toute la vie de leurs victimes. C’est Héloïse et Abailard dans la réalité, c’est Roméo et Juliette dans la fiction ; mais ces légendes d’amour sont rares. Toutes les femmes les ambitionnent pour elle-mêmes ; cependant, elles savent bien que ce n’est pas dans leur boudoir, ou dans leur salon, entre le café et le thé, qu’elles trouveront le héros de Vérone ou le philosophe du Paraclet. Aussi n’est-ce ni aux Juliettes, ni aux Héloïses, s’il s’en trouve encore, que ce discours s’adresse. Celles-là connaissent et connaîtront des émotions contre lesquelles mes arguments et tous ceux de la philosophie ont la valeur et la résistance d’un fétu de paille. Je les honore d’ailleurs et suis prêt à les chanter. L’amour à cette puissance est presque l’égal de la vertu. Je vise moins haut et ne m’occupe que de l’amour courant, qui va en voiture, au spectacle, au bal, qui rit pendant, qui se plaint après, qui recommence et qui, sous cette double forme, — prostitution — adultère, — mine peu à peu la famille, sans qu’on s’en aperçoive, comme les rats minent une maison à l’insu des locataires. Je suis las aussi, je l’avoue, d’entendre toujours répéter les mêmes subtilités, les mêmes sophismes, touchant cette vieille question ; et j’ai voulu, avant de mourir, me donner la joie d’imprimer la vérité toute vive. L’occasion s’est présentée, je l’ai saisie. Faites-en votre