Page:Dumas fils - Théâtre complet, 1898 - Tome I.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se crut forcée d’intervenir de nouveau, non seulement au point de vue de la morale, mais au point de vue de la salubrité. Elle dit aux filles libres : « Puisque vous avez fait de l’amour un commerce, vous serez astreintes, d’abord aux charges des commerçants : vous aurez une boutique, une patente et une carte, et puis vous serez méprisables. » Elle dit aux femmes adultères : « Puisque vous avez manqué aux stipulations du traité matrimonial, je donne le droit à votre mari de vous exclure, et vous serez méprisées. » Dans les deux camps, il n’y eut que les filles bêtes ou les femmes maladroites qui se laissèrent parquer. Parmi les courtisanes, les plus fines évitèrent la carte ; parmi les femmes mariées, les plus habiles esquivèrent la loi. Aujourd’hui, la prostitution illustre et enrichit les unes, et l’adultère console et quelquefois enrichit les autres.

Voilà où nous en sommes.

Cette fois, la société n’ose plus intervenir ; c’est ici qu’elle a tort, car jamais le mal n’a été si grand, et cependant il est réparable. Voyons les moyens.

Quelles sont les excuses, vraies ou fausses, de la courtisane ? Quelles sont les excuses, vraies ou fausses, de la femme adultère ?

Les excuses de la courtisane sont : l’ignorance, la famille absente ou vicieuse, les mauvais exemples, le manque d’éducation, de religion, de principes, et surtout et toujours une première faute commise, souvent avec un parent, quelquefois avec le frère ou le père (voir les statistiques à la préfecture de police), une mère qui les a vendues, la misère enfin et tout ce qui l’accompagne.

Les excuses de la femme adultère sont le mari qui néglige, trompe ou ruine sa femme, l’oisiveté, l’impuissance de l’homme, la stérilité de la femme, le besoin d’appui, de solidarité et d’amour.

Quels sont les moyens de mettre les femmes, mariées ou non, dans l’impossibilité de donner ces excuses, de manière qu’il ne leur reste plus que celles qu’elles ne donnent jamais (justement parce que la société les met