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Faucher, non plus en homme qui sollicite une grâce, mais en homme qui réclame un droit, et la pièce nous fut rendue définitivement.

Habent, sicut libelli, sua fata comœdiæ.

Ce serait ici le moment ou jamais de faire pour la millième fois une sortie contre la censure. Dieu m’en garde ! pour trois raisons au moins. — La première, c’est que je me suis promis et vous ai promis aussi, dans ma préface, d’éviter autant que possible le ton solennel et certains grands mots trop lourds pour moi. La seconde, c’est que cette tirade est inutile, et que, dans un temps rapide comme le nôtre, il ne faut dire que ce qui peut servir à quelque chose. La troisième, c’est que la censure n’a jamais pu ni arrêter ni dénaturer une œuvre de mérite depuis Tartufe jusqu’au Mariage de Figaro, depuis le Mariage de Figaro jusqu’à Marion Delorme, depuis Marion Delorme jusqu’au Fils de Giboyer. L’œuvre a toujours passé par-dessus, par-dessous, ou au travers. Les gouvernements se figurent qu’ils ont encore besoin de cette institution des vieux âges ; ils se croient bien à couvert derrière cette palissade de bois blanc, qui leur coûte une cinquantaine de mille francs par année et qui fournit à la vie de cinq ou six personnes, lesquelles font le plus convenablement possible cette besogne difficile et ennuyeuse ; respectons cette manie des gouvernements. Les jardiniers continuent à mettre dans les cerisiers trois ou quatre vieux chiffons pour empêcher les moineaux d’y venir ; c’est une tradition qui les tranquillise ; les moineaux, qui savent que ce ne sont là que des chiffons, viennent tout de même dans les arbres et mangent les fruits. Tout le monde est content, et il y a toujours sur la route un passant qui rit du jardinier. Voilà l’important. C’est si bon de rire ! Ne prenons donc au sérieux que ce qui est sérieux, et la censure n’est pas sérieuse ; elle est même pour nous une complice de première qualité.

Exemple : Nous voulons mettre en scène, ce qui est notre droit et notre devoir, depuis que la comédie a été