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femme, jamais sœur n’eut pour son époux ou pour son frère l’amour et les soins qu’elle avait pour moi. Cette nature maladive était prête à toutes les impressions, accessible à tous les sentiments. Elle avait rompu avec ses amies comme avec ses habitudes, avec son langage comme avec les dépenses d’autrefois. Quand on nous voyait sortir de la maison pour aller faire une promenade dans un charmant petit bateau que j’avais acheté, on n’eût jamais cru que cette femme vêtue d’une robe blanche, couverte d’un grand chapeau de paille, et portant sur son bras la simple pelisse de soie qui devait la garantir de la fraîcheur de l’eau, était cette Marguerite Gautier qui, quatre mois auparavant, faisait bruit de son luxe et de ses scandales.

Hélas ! nous nous hâtions d’être heureux, comme si nous avions deviné que nous ne pouvions pas l’être longtemps.

Depuis deux mois nous n’étions même pas allés à Paris. Personne n’était venu nous voir, excepté Prudence, et cette Julie Duprat dont je vous ai parlé, et à qui Marguerite devait remettre plus tard le touchant récit que j’ai là.

Je passai des journées entières aux pieds de ma maîtresse. Nous ouvrions les fenêtres qui donnaient