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cines, et rien n’a poussé depuis plus de six siècles, là où la vengeance guelfe a passé la charrue et a semé le sel.

Ce palais était la résidence d’un gonfalonier et de huit prieurs, deux pour chaque quartier de la ville : leur charge durait soixante jours, et pendant ces soixante jours, ils vivaient ensemble, mangeant à la même table et ne pouvant sortir de cette résidence, c’est-à-dire qu’ils restaient à peu près prisonniers ; ils avaient chacun deux domestiques pour les servir, et tenaient à leurs ordres un notaire toujours prêt à écrire leurs délibérations, lequel mangeait avec eux et était prisonnier comme eux. En échange du sacrifice que chaque prieur faisait à la république de son temps et de sa liberté, il recevait dix livres par jour, à peu près sept francs de notre monnaie. La parcimonie privée se réglait alors sur l’économie publique, et le gouvernement se trouvait ainsi en état d’exécuter de grandes choses dans l’art et dans la guerre. De là lui était venu le surnom de la Magnifique République.

On entre dans le Palais-Vieux par une porte placée au tiers à peu près de sa façade, et l’on se trouve dans une petite cour carrée, entourée d’un portique soutenu par neuf colonnes d’architecture lombarde enjolivées d’applications. Au milieu de cette cour est une fontaine surmontée d’un Amour rococo, tenant un poisson et reposant sur un bassin de porphyre. À l’époque du mariage de Ferdinand, on orna ce portique de peintures à fresques représentant des villes d’Allemagne vues à vol d’oiseau.

Au premier étage, est la grande salle du Conseil, exécutée par les ordres de la république et sur les instances de Savonarole. Mille citoyens y pouvaient délibérer à l’aise. Cronaca en fit l’architecture, et il en pressa tellement la construction, que Savonarole avait l’habitude de dire que les anges lui avaient servi de maçons.

Cronaca avait raison de se hâter, car trois ans après Savonarole devait mourir, et trente ans plus tard la république devait tomber.

Aussi, cette immense salle n’a-t-elle rien gardé de cette époque que sa forme première ; tous ses ornemens appartiennent au principat, ses fresques et son plafond sont de