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Parmi ces nombreux promeneurs, mais seulement plus pressé, plus coudoyé, plus saluant que les autres, passe le grand-duc et sa famille ; toute sa garde consiste en deux ou trois valets qui le suivent d’assez loin pour ne pas entendre la conversation.

De Longo-l’Arno, on revient faire la station obligée au Piazzonne. Là seulement on retrouve bravant ce qu’ils appellent les rigueurs de la saison, quelques Florentins francisés, trop amoureux pour craindre le froid, ou trop jeunes pour craindre les rhumatismes. Quant aux Florentines, il est rare d’en apercevoir plus de deux ou trois dans les plus beaux jours, encore ne font-elles qu’une station d’un instant, et juste ce qu’il faut pour prendre quelques petits arrangemens indispensables pour le soir, pour la nuit ou pour le lendemain.

C’est à la Pergola qu’on se retrouve. La Pergola, ce sont les Bouffes de Florence. Tout ce qu’il y a de Florentins ou d’étrangers dans la capitale de la Toscane, du mois d’octobre au mois de mars, loge à la Pergola ; c’est une chose dont on ne peut pas se dispenser. Dînez à table d’hôte, ou au restaurant de la Lune, mangez chez vous du macaroni et du baccala, personne ne s’en occupe, c’est votre affaire ; mais ayez une loge à l’un des trois rangs nobles, c’est l’affaire de tout le monde. Une loge et une voiture sont les indispensabilités de Florence. Qui a loge et voiture est un grand seigneur, qui n’a ni loge ni voiture, s’appelât-il Rohan ou Corsini, Poniatowski ou Noailles, n’est qu’un croquant. Réglez-vous là dessus ; et, si vous venez à Florence, faites la bourse de la loge et de la voiture, comme en allant de Rome à Naples on fait la bourse des voleurs.

Au reste, voitures et loges ne sont pas cher, à Florence ; on a une voiture au mois pour deux cent cinquante francs, et une loge à la saison pour cent piastres. Ajoutez à cela que la loge à la Pergola vaut quatre fois son prix, non point pour le spectacle, personne ne s’occupe du spectacle à Florence ; mais pour la salle, j’entends par salle les spectateurs.

En effet, c’est à la Pergola que se croisent tous les feux de la coquetterie féminine. Là, comme à la promenade, les Florentines sont en minorité. La majorité se compose d’é-