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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

D’une sentence si amère.
Por leur traïson et péchié,
Que ils furent escorchié,
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Et puis entraîné et pendu |

Marguerite et Blanche furent conduites aux Andelys, où on les jeta, dit Godefroy, dans une espèce de basse-fosse.

Longuement en prison là furent,
Et de confort moult petit urent.
L’une ne l’autre ni et aise ;
Mais toutes voies plus à mal aise
Eut la royne de Navarre,
En haut estoit ; et à la terre
La comtesse fut plus aval,
Dont elle souffroit moins de mal,
Gar elle estoit plus chaudement.
Ce fut justice voirement,
Car la royne cause estoit
Du péché que elle avoit fait.

De cette prison, on les transféra au Château-Gaillard, forteresse de Normandie. Là, par ordre de Louis X, Marguerite fut étranglée avec une serviette, selon les uns ; avec ses propres cheveux, selon les autres. Blanche, épargnée et divorcée, prit le voile à l’abbaye de Maubisson, où elle termina sa vie.

Mais Jeanne fut plus heureuse encore ; elle avait été arrêtée comme ses sœurs :

Et, quand la comtesse ce vit,
Hautement s’écria et dit :
« Por Dieu, oiez moi, sire roi ;
Qui est qui parle contre moi ?
Je dis que je suis preude fame,
Sans nul crisme, sans nul diffame ;
Et sé nul ne veut contre dire,
Gentil roy, je vous réquier, sire,
Que vous m’oiez en déffendant.
Sé nul ou nulle demandant
Me fait chose de mauvestie.
Mon coeur sens si par, si traille,