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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Que le diable vous emporte !

— Vous ne restez pas à dîner avec nous ?

— Merci.

— Vous n’embrassez pas Georges ?

— Si fait… Est-elle contente de son succès ?

— Enchantée ! quoique vous l’ayez un peu sacrifiée à Bocage, convenez-en.

— Bon ! ne va-t-elle pas me faire un procès, elle aussi ?

— Elle en a bonne envie, et cela pourra bien arriver, à moins que vous ne lui promettiez de lui faire une pièce.

— Oh ! je le lui promets, qu’à cela ne tienne !

— Elle a une idée.

— Ce n’est pas le Divorce ?

Georges m’avait tourmenté longtemps pour lui faire une pièce sur le divorce de l’empereur.

— Non, soyez tranquille.

Je montai chez elle. Nous nous embrassâmes, comme nous nous embrassons encore aujourd’hui quand nous nous rencontrons.

Je lui racontai toute notre discussion à propos de M. Gaillardet, et j’eus la douleur de voir qu’elle donnait entièrement raison à Harel.

— Alors, c’est bien, dis-je, n’en parlons plus… À propos, que m’a-t-il dit ?

— Harel ?

— Oui.

— Quelque bêtise.

— Justement… Il m’a dit que vous aviez une idée.

— Insolent !

— Une idée de pièce, bien entendu. Peste ! vous avez bien mieux que des idées ; vous avez des caprices.

— Pas pour vous, dans tous les cas !

— C’est bien ce dont je me plains.

J’allai me mettre à genoux devant elle, et, baisant ses belles mains :

— Dites donc, Georges, est-ce que nous aurons le ridicule, aux yeux de la postérité, d’avoir passé l’un près de l’autre