Cette fois, le succès appartenait aux deux acteurs ; je courus au théâtre pour les embrasser.
Pas d’Adèle ! pas d’Antony !
Je crus un instant qu’emportés par l’ardeur de la représentation, ils avaient repris la mise en scène à ces mots : Antony lui jette un mouchoir sur la bouche, et l’emporte dans sa chambre, et qu’ils continuaient la pièce.
Je me trompais : chacun d’eux changeait de costume pour le quatrième acte, et était enfermé dans sa loge.
Je leur criai toute sorte de tendresses à travers la porte.
— Êtes-vous content ? me demanda Bocage.
— Enchanté !
— Bravo ! le reste regarde Dorval.
— Vous ne la laisserez pas en route ?
— Oh ! soyez tranquille !
Je courus à la porte de Dorval.
— C’est superbe, ma petite ! splendide ! magnifique !
— Est-ce toi, mon grand chien ?
— Oui.
— Entre donc, alors !
— Mais la porte est fermée.
— Pour tout le monde, mais pas pour toi.
Elle m’ouvrit, toute défaite, à moitié déshabillée, et se jeta dans mes bras.
— Je crois que nous en pinçons un, mon petit !
— Un quoi ?
— Tiens donc ! un succès !
— Hum ! hum !
— Tu n’es pas content ?
— Si fait !
— Diable ! tu serais difficile ! Il me semble pourtant que nous avons passé de rudes ornières !
— C’est vrai, tout a été bien jusqu’à présent ; mais…
— Mais quoi, voyons, mon grand chien ?… Oh ! que je t’aime, va ! de m’avoir donné un si beau rôle !… As-tu vu des femmes du monde, hein ?
— Non.