Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/71

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
68
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

aujourd’hui, Dieu merci ! je puis répondre autre chose… Seulement, votre désir change le lieu de notre déjeuner : au lieu de venir déjeuner ici, venez déjeuner chez moi… Vous savez mon adresse ?

— J’étais chez vous il y a huit jours ; ne vous le rappelez-vous pas ?

— Si fait.

— Et quand ce déjeuner, général ?

— Voyons… nous sommes aujourd’hui le 5… Voulez-vous demain ? Sinon, ce ne pourrait être que le 10 ou le 11.

— J’aime mieux demain, général ; je suis pressé de partir… Ainsi, demain, rue d’Anjou-Saint-Honoré, n’est-ce pas ?

— Oui.

— À quelle heure ?

— À neuf heures… C’est de bonne heure, je sais ; mais je voudrais être ici à onze.

— Soyez sans crainte, général, je ne vous ferai point attendre.

— Nous serons seuls ; je veux causer longuement et tranquillement avec vous.

— C’est une double faveur que vous m’accordez, général.

On vint annoncer je ne sais quelle députation. Je me retirai.

Le lendemain, à neuf heures moins dix minutes, j’étais rue d’Anjou-Saint-Honoré, n° 6.

Le général m’attendait dans son cabinet.

— Nous déjeunerons ici, me dit-il, si cela vous convient… D’ailleurs, nous aurons sous la main certaines choses dont nous devons causer.

Je souris.

Il m’arrêta, voyant que j’allais renouveler la question que je lui avais faite la veille.

— Parlons d’abord, me dit-il, de votre projet sur la Vendée.

— Volontiers, général.

— Y avez-vous réfléchi ?

— Autant que je suis capable de réfléchir à quelque chose ; je suis un homme d’instinct, et non de réflexion, moi.

— Voyons, dites-moi bien la proposition que vous me faites.