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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Cette affiche annonçait hautement que les d’Orléans étaient, non pas Bourbons, mais Valois.

Je ne pouvais en croire mes yeux ; je restai un quart d’heure à lire et à relire.

À dix pas de là, je rencontrai Oudard ; je le pris par le bras, et le ramenai de force devant le placard.

— Oh ! lui dis-je, n’était-ce pas assez que Philippe-Égalité reniât son père, et faut-il que le fils renie sa race ?

Je rentrai chez moi, je l’avoue, anéanti.

Quel jour était-ce ? Je ne sais plus bien ; mais ce devait être le 2 août.

La poudre était arrivée le matin avec Bard ; je l’avais remise à deux élèves de l’École polytechnique qui m’en donnèrent un reçu, et la conduisirent à la Salpêtrière.

Ce devait être le 2, car je vis passer, allant au Palais-Royal, M. de Latour-Foissac, que je connaissais de vue, l’ayant rencontré chez madame de Sériane, la sœur de M. le général de Coëtlosquet.

M. de Latour-Foissac apportait au lieutenant général la réponse à sa lettre de la veille, à cette lettre substituée, vous savez, à celle de M. Dupin.

Cette réponse, c’était l’abdication de Charles X ; c’était l’abdication de M. le duc d’Angoulême ; c’était la mission donnée au duc d’Orléans de faire proclamer le duc de Bordeaux sous le nom d’Henri V.

Le lieutenant général refusa de recevoir le messager, mais il prit le message.

Que faire ?

M. Sébastiani, consulté, était pour la régence.

Béranger, consulté, était pour la royauté.

Le duc d’Orléans trancha la difficulté en disant :

— Être régent ? J’aime mieux n’être rien… À là première douleur d’entrailles qu’éprouverait Henri V, on crierait sur les toits que je suis un empoisonneur.

À partir de ce moment, il n’y eut plus de doute pour personne que Louis-Philippe ne fût roi.