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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

ceux de nos lecteurs qui désireraient la connaître dans tous ses détails.

Nous nous bornerons, quant à nous, à dire que la reine repoussa avec indignation l’offre du trône, mais que, moins dédaigneuse, et surtout moins indignée, madame Adélaïde, non-seulement ne repoussa rien, mais encore promit presque tout au nom de son frère.

M. de Montesquiou fut immédiatement envoyé au Raincy.

Le moment attendu par la race des d’Orléans, depuis qu’elle existait côtoyant la royauté, était donc enfin venu. Le but de cette ambition, éveillée dès 1790 pour le duc actuel, ménagée avec tant de soin pendant les quinze ans de royauté de Louis XVIII et de Charles X, pouvait être atteint ; il n’y avait plus que le bras à étendre et un mot à dire.

Mais, à cette heure décisive, le cœur faillit presque au duc d’Orléans.

Décidé à partir derrière M. de Montesquieu, il envoya celui-ci annoncer son arrivée, et partit en effet ; mais, au bout d’un quart de lieue, il revint sur ses pas.

Ce qui fit, de Louis-Philippe, le roi des Français, ce fut la crainte de perdre ses six millions de rente.

Et, cependant, au moment même où le duc d’Orléans retournait au Raincy au grand galop de ses chevaux, la Chambre se réunissait, et M. Laffitte, nommé par acclamation président, — première flatterie à la puissance future ; — M. Laffitte posait, pour ainsi dire, les bases de la royauté de juillet.

Tandis que M. Thiers revient de Neuilly, et raconte à qui veut l’entendre le charmant accueil qu’il a reçu des princesses ; tandis que le duc d’Orléans, près de manquer à sa destinée, tourne le dos à ce pouvoir qu’il a tant convoité ; tandis que M. Laffitte, poursuivant son rêve de dix ans, sert cette ambition défaillante qui, en se réalisant, doit souffler sur sa fortune et sa popularité, et les éteindre toutes deux, au lieu de les ranimer, — disons, en peu de mots, ce que faisaient les royalistes d’un côté, et les républicains de l’autre.

Quand il eut cédé aux désirs de M. de Vitrolles, de M. de Sémonville et de M. d’Argout ; quand il se fut laissé arra-