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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

de la proclamation du général la Fayette, se rendrait immédiatement chez le docteur Missa.

Le docteur Missa était le chef de l’opposition libérale, et avait dit cent fois qu’il n’attendait qu’une occasion de se mettre en avant.

L’occasion était belle, et nous espérions qu’il ne la manquerait pas.

Hutin croyait pouvoir également compter sur deux de ses amis, l’un nommé Moreau, l’autre nommé Quinette.

Quinette, fils du conventionnel, est le même qui fut, depuis, député sous Louis-Philippe, et ambassadeur à Bruxelles sous la République.

On verra comment chacun d’eux répondit à l’appel fait au nom de la Révolution.

En sortant de la poudrière, je devais me rendre chez le commandant de place, M. de Limiers, et, l’ordre du général Gérard à la main, obtenir de lui, de gré ou de force, l’autorisation d’enlever la poudre.

J’étais prévenu que M. de Limiers était plus qu’un royaliste : M. de Liniers était un ultra !

À la première nouvelle de l’insurrection de Paris, il avait déclaré que, de quelque façon que les choses tournassent dans la capitale, il s’ensevelirait sous les ruines de Soissons, et que sur la plus haute pierre de ces ruines flotterait le drapeau blanc.

Il était donc à peu près certain que c’était de ce côté-là que viendrait la résistance sérieuse.

Je ne m’en préoccupai pas autrement : chaque événement de la journée devait se dérouler à son tour.

À trois heures dix minutes du matin, nous sortîmes donc de la maison de madame Hutin, qui fut admirable de courage, et qui, au lieu de retenir son fils, le poussa en avant.

Au bout de la rue, nous nous séparâmes, Hutin et Bard pour se rendre à la cathédrale, moi pour me rendre à la poudrière.

Comme il pouvait être dangereux d’entrer dans l’enceinte