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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

être affichée sur tous les murs de Paris, et la première proclamation de ce gouvernement devait paraître dans le Constitutionnel.

Il va sans dire que le brave Constitutionnel était de bonne foi, et qu’il tenait pour de réelles et valables signatures les trois essais calligraphiques de Taschereau.

Là-dessus, je rentrai chez moi plus tranquille : et, comme j’étais éreinté de la journée, je m’endormis sur les deux oreilles, au bruit du bourdon de Notre-Dame, et au pétillement irrégulier de quelques coups de fusil attardés et perdus.


CXLIX


Envahissement du musée d’artillerie. — L’armure de François Ier. — L’arquebuse de Charles IX. — La place de l’Odéon. — Ce qu’avait fait Charras. — Les habits de l’École polytechnique. — Millotte. — La prison Montaigu. — La caserne de l’Estrapade. — D’Hostel. — Un bonapartiste. — L’écuyer Chopin. — Lothon. — Le général en chef.

Le lendemain, je fus éveillé par mon domestique Joseph.

Il se tenait debout près de mon lit, et, avec une progression chromatique de la voix, il répétait :

— Monsieur !… monsieur !!… monsieur !!!…

Au troisième monsieur, je grognai, je me frottai les yeux, et me mis sur mon séant.

— Eh bien, demandai-je, qu’y a-t-il ?

— Ah ! par exemple, monsieur n’entend pas ? fit Joseph en joignant ses mains au-dessus de sa tête.

— Comment veux-tu que j’entende, imbécile, puisque je dors ?

— Mais on se bat tout autour d’ici, monsieur !

— Vraiment ?

Il ouvrit la fenêtre.

— Écoutez, c’est comme si c’était dans la cour.

En effet, des coups de fusil me paraissaient partir d’un point très-rapproché.