— Mais sur le théâtre, pendant que M. Michelot et M. Joanny causent ensemble.
— Vous écoutez, madame.
— Ah ! j’écoute… Je comprends ; seulement, je trouve que j’écoute un peu longtemps.
— Vous savez que la scène était beaucoup plus longue, et que je l’ai déjà raccourcie d’une vingtaine de vers ?
— Eh bien, mais ne pourriez-vous pas la raccourcir encore de vingt autres ?…
— Impossible, madame !
— Ou, tout au moins, faire que j’y prenne part d’une façon quelconque ?
— Mais vous y prenez part naturellement, par votre présence même. Il s’agit de l’homme que vous aimez ; on débat sa vie ou sa mort ; il me semble que la situation est assez forte pour que vous en attendiez impatiemment mais silencieusement la fin.
— C’est égal… c’est long !
— Je ne trouve pas, madame.
— Bon ! n’en parlons plus… Mais, certainement, le public se demandera : « Que fait donc là mademoiselle Mars, la main sur sa poitrine ? Ce n’était pas la peine de lui donner un rôle pour la faire tenir debout, un voile sur les yeux, et sans parler, pendant toute une moitié d’acte ! »
— Le public se dira que, sous la main, non pas de mademoiselle Mars, mais de doña Sol, son cœur bat ; que, sous le voile, non pas de mademoiselle Mars, mais de doña Sol, son visage rougit d’espérance ou pâlit de terreur ; que, pendant le silence, non pas de mademoiselle Mars, mais de doña Sol, l’amante d’Hernani amasse dans son cœur l’orage qui éclate par ces mots, médiocrement respectueux d’une sujette à son seigneur :
Roi don Carlos, vous êtes
Un mauvais roi !…
et, croyez-moi, madame, cela suffira au public.
— C’est votre idée, soit ! Au fait, je suis bien bonne de me