— Eh bien, avez-vous trouvé un autre hémistiche ?
— Je vous avoue que je n’en ai pas cherché.
— Vous ne trouvez donc pas cet hémistiche dangereux ?
— Qu’appelez-vous dangereux ?
— J’appelle dangereux ce qui peut être sifflé.
— Je n’ai jamais eu la prétention de ne pas être sifflé.
— Soit ; mais il faut être sifflé le moins possible.
— Vous croyez donc qu’on sifflera l’hémistiche du lion ?
— J’en suis sûre !
— Alors, madame, c’est que vous ne le direz pas avec votre talent habituel.
— Je le dirai de mon mieux… Cependant, je préférerais…
— Quoi ?
— Dire autre chose.
— Quoi ?
— Autre chose, enfin !
— Quoi ?
— Dire, — et mademoiselle Mars avait l’air de chercher le mot, que, depuis trois jours, elle mâchait entre ses dents, — dire, par exemple… heu… heu… heu…
Vous êtes, monseigneur, superbe et généreux !
Est-ce que monseigneur ne fait pas le vers comme mon lion ?
— Si fait, madame ; seulement, mon lion relève le vers, et monseigneur l’aplatit. J’aime mieux être sifflé pour un bon vers qu’applaudi pour un méchant.
— C’est bien, c’est bien !… ne nous fâchons pas… On dira votre bon vers sans y rien changer ! — Allons, Firmin, mon ami, continuons…
Vous êtes, mon lion, superbe et généreux !
Il est bien entendu que, le jour de la première représentation, mademoiselle Mars, au lieu de dire : « Vous êtes, mon lion ! » dit ; « Vous êtes, monseigneur ! ».