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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Poëtes anglais et les Critiques écossais, avec cette double épigraphe, tirée, l’une de Shakspeare, et l’autre de Pope :

« … J’aimerais mieux devenir chat et miauler, que d’être un de ces marchands de ballades rimées… »

« … Tels sont nos poëtes sans vergogne ; mais, il faut le dire, nous avons des critiques non moins insensés, non moins misérables que nos poëtes… »

Cette satire lancée, il n’y avait plus moyen de reculer. Byron appartenait corps et âme à la poésie, cette robe de Nessus qui dévore, mais qui immortalise.

Et, cependant, un instant il balança : sa naissance lui donnait un siège à la chambre des lords ; il résolut d’aller occuper ce siège. Si ses aristocrates collègues le recevaient bien, qui sait ? peut-être allait-il tout abandonner, même l’idée de son voyage en Perse, avec son ami Hobhouse, pour suivre son condisciple Robert Peel dans la carrière politique. Tout cela va dépendre d’un sourire, d’un serrement de main ; pour ce sourire, pour ce serrement de main, il jettera cette plume qui a écrit les Heures de loisir et les Poëtes anglais et les Critiques écossais ; il dira adieu au jeu, aux paris, aux courses, à l’ivresse, et se séparera de cette folle jeunesse que lui a faite l’oubli de miss Chaworth ; il quittera tout, jusqu’à cette femme qui l’a suivi en homme à Brighton, et dont la présence scandaleuse a soulevé d’indignation la pudique aristocratie anglaise !

C’est alors qu’il écrit à sa mère cette lettre qui indique à quel degré de froideur en est le fils avec la mère :

À l’honorable lady Byron.
« Newstead-Abbey, 7 octobre 1808.
» Chère madame,

» Je n’ai pas de lits pour les H***, ni pour qui que ce soit à présent ; d’ailleurs, les H*** couchent à Mansfield. Je ne sache