Page:Dumas - Mes mémoires, tome 4.djvu/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
84
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

fut à peine, dit un de ses biographes, s’il parvint à apprendre à épeler ses lettres.

J’eus encore cet avantage sur toi, Byron, c’est que ce fut ma mère qui m’apprit à lire ; Dieu me donna au moins la moitié de ce qu’il te refusa, une bonne mère.

De l’école d’Aberdeen, Byron passa au gymnase de la même ville. Hélas ! Byron en fut un des plus mauvais écoliers : il était toujours le dernier de ses camarades, et l’on y garde le souvenir des plaisanteries dont ses maîtres l’accablaient.

En 1798, le vieux lord Byron mourut. C’était un noble roué qui avait eu force amours et force duels. Dans un de ces duels, il avait tué son ami Chaworth, événement qui devait avoir aussi son influence sur la vie de son fils.

Deux ans auparavant, le jeune Byron avait fait un voyage dans la haute Écosse : de là son amour pour les hauts sommets, cette prédilection des aigles et des poëtes, qui lui fit célébrer plus tard les Alpes, les Apennins et le Parnasse.

Pendant ce voyage, le Dante futur trouva sa Béatrix : celle-là s’appelait Marie Duff, et n’avait que huit ans.

Le vieux lord Byron mourut donc à l’abbaye de Newstead.

Byron était son héritier. Il quitta Aberdeen avec sa mère ; on vendit le mobilier soixante et quinze livres sterling, autre ressemblance avec moi, — qu’on me pardonne les comparaisons, je n’aurai pas l’orgueil de les pousser plus loin, — et l’on arriva Newstead.

Là, on donna un charlatan au jeune homme ; il s’agissait de lui redresser le pied ; c’était la plus grande préoccupation de sa vie, on se le rappelle, que cette infirmité. — Ce charlatan s’appelait Lavandre.

Comme on vit que, malgré le traitement indiqué par ce malheureux, le jeune lord ne boitait ni plus ni moins, on l’envoya à Londres, où il fut confié — physiquement aux soins du docteur Baillie, — et moralement à ceux du docteur Glennie.

Là, les deux docteurs eurent quelque succès. Le docteur Glennie vit son élève porté, par-dessus toute chose, vers l’histoire et la poésie, et le poussa dans ces deux voies.

Le docteur Baillie lui redressa le pied, au point qu’il put