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brutus.

Prêtre, écoute ton fils. — Tu te souviens, sans doute,
D’un nom sacré, d’un nom que le tyran redoute,
D’un nom qui flamboyait sur le front d’un mortel,
Comme un feu de Cybèle allumé sur l’autel,
De Brutus ?

faustus.

Sa mémoire est-elle ensevelie ?
Ce nom est-il de ceux que le Romain oublie ?
Il vivra tant qu’un prêtre en tunique de lin
Dira l’hymne de Rome au dieu capitolin !
Je l’ai connu ! J’ai vu s’incliner, comme l’herbe.
Ce héros sous le fer de Tarquin le Superbe !…
Il est mort ! Morts aussi tous ses nobles parents,
Hécatombe de gloire immolée aux tyrans !

brutus.

Prêtre, il lui reste un fils.

faustus.

 Je le sais : corps sans âme !
Noble front que le ciel a privé de sa flamme !
Ombre errante qui va demander sa raison
Au sang liquide encore au seuil de sa maison !

brutus.

C’est un faux bruit : sa main à la vengeance est prête ;
Minerve a conservé sa raison dans sa tête.
Son père lui légua son visage, sa voix,
Sa vertu…

faustus, s’écriant.

 Dieux, je veux l’embrasser !.

brutus.

 Tu le vois.

faustus.

Oh !…

(Serrant Brutus dans ses bras).

 Les dieux quelquefois jettent sur la paupière