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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Tel que Rome en prépare à nos dieux immortels
Et le sang des taureaux rougira tes autels.
Mais, aujourd’hui, reçois avec un œil propice
La prière et le don du pieux aruspice ;
Ces fruits qu’une vestale a cueillis, ce matin,
Dans le verger du temple, au pied de l’Aventin,
Et ce lait pur qui vient de la haute colline
Où, la nuit, on entend une voix sibylline,
Quand le berger craintif suspend aux verts rameaux
La flûte qu’un dieu fit avec sept chalumeaux.
L’aube sur Le Soracte annonce sa lumière ;
Si j’apporte déjà mon offrande première,
C’est qu’une grande voix a retenti dans l’air ;
C’est que la foudre, à gauche, a grondé sans éclair,
Et que, dans cette nuit sombre et mystérieuse,
A gémi l’oiseau noir aux branches de l’yeuse.
Ô dieu lare ! dis-moi quel forfait odieux
Doit punir aujourd’hui la colère des dieux,
Afin que le flamine et la blanche vestale
Ouvrent temple saint la porte orientale,
Et qu’au maître des dieux, dans les rayons naissants,
Montent avec le jour la prière et l’encens.


Scène II

faustus, brutus, en tunique de couleur brune, comme un laboureur
suburbain
.
brutus.

Que les dieux te soient doux, vieillard, et que Cybèle
Jamais dans tes jardins n’ait un sillon rebelle !
La fatigue m’oppresse ; à l’étoile du soir,
Hier, je vins à la ville…

faustus.

Ici, tu peux t’asseoir.
Modeste est ma maison, étroite est son enceinte ;
Mais j’y vénère encor l’hospitalité sainte,
Et j’apaise toujours la faim de l’indigent,
Comme si mon dieu lare était d’or ou d’argent.