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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Talma leur tendit sa main, qu’ils baisèrent.

Un instant après, il prononça ces trois mots :

— Voltaire !… comme Voltaire !…

Puis, presque aussitôt, il murmura :

— Le plus cruel de tout cela, c’est de n’y plus voir !

Dans un autre moment, un meuble fit entendre un craquement assez fort. Talma tourna la tête du côté d’où partait le bruit.

Une dame qui venait d’arriver profita de ce mouvement pour lui dire :

— Talma, c’est moi, c’est mademoiselle Menocq.

Le moribond fit un petit signe des yeux, et lui serra la main.

Onze heures et demie sonnèrent.

Talma prit son mouchoir avec les deux mains, le porta, d’abord, lentement à sa bouche, qu’il essuya ; puis, ensuite, derrière sa tête, le tenant toujours avec ses deux mains.

Au bout de quelques secondes, les deux mains se détendirent, et retombèrent de chaque côté de son corps.

Son neveu prit, alors, celle qui était au bord du lit, et sentit que cette main serrait encore légèrement la sienne.

Enfin, à onze heures trente-cinq minutes, sans convulsions, sans contraction des muscles de la face, un soupir s’échappa de sa bouche. C’était le dernier.

Lorsque Garrick mourut, quatre pairs d’Angleterre tinrent à honneur de porter les quatre coins du drap mortuaire, et d’accompagner le Roscius anglais jusqu’au milieu des tombes royales où il repose.

Cent mille personnes accompagnèrent le cercueil de Talma, mais pas une des hautes autorités de l’État n’assista à ses funérailles.

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Lassagne m’avait dit de chercher un sujet de vaudeville. J’avais cherché ce sujet, et je croyais l’avoir trouvé.

C’était dans les Mille et une Nuits, un épisode des voyages de Sindbad le marin, je crois.

Je dis : « je crois, » car je n’en suis pas bien sûr, et la chose