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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

vendre mes livres, et pour ne plus les faire imprimer de compte à demi.

Au reste, ce nom, si petit et si modeste qu’il fût, commençait à percer la terre. Vatout avait lu mon Ode au général Foy et mes Nouvelles contemporaines, — car on comprend que la vente de quatre exemplaires avait donné un large champ à mes générosités, — et, un jour, il m’envoya trois ou quatre lithographies en m’invitant à en prendre une pour faire des vers dessus.

Cela demande une explication.

Vatout publiait la Galerie du Palais-Royal. Cet ouvrage, magnifiquement imprimé, paraissait sous le patronage du duc d’Orléans.

C’était la reproduction lithographique de tous les tableaux de la galerie du Palais-Royal, avec des notices, des nouvelles ou des vers faits sur ces tableaux par toute la littérature contemporaine.

Je comptais donc dans la littérature contemporaine, puisque Vatout me demandait des vers.

Le raisonnement, posé ainsi, pouvait plutôt être un sophisme qu’un dilemme ; mais, comme je n’avais à le discuter avec personne, il tint comme dilemme dans mon esprit, et me devint un encouragement.

Oh ! je ne demandais pas mieux que d’en recevoir de tous les côtés, des encouragements !

Je choisis une lithographie représentant un pâtre romain, d’après un tableau de Montvoisin.

Le pâtre était couché et dormait sous une treille.

Je ne donne point comme bons les vers que je fis sur ce sujet. Je les donne comme une étude curieuse de mes progrès dans la langue poétique.

Il est une heure plus brûlante
Où le char du soleil, au zénith arrêté,
Suspend sa course dévorante,
Et verse des torrents de flamme et de clarté.
Alors, un ciel d’airain pèse au loin sur la terre,
Les monts sont désertés, la plaine est solitaire,