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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Ce brave M. Marle publiait un journal écrit dans cette étrange langue que nous venons de dire.

Ce journal, il le publiait chez un imprimeur qui demeurait cour des Fontaines, et qui s’appelait Setier.

En faisant la connaissance de M. Marle, j’avais fait la connaissance de M. Setier, j’avais fait celle de madame Setier.

Madame Setier était une femme distinguée, Anglaise, ou tout au moins sachant parfaitement l’anglais.

Elle m’avait offert de me traduire quelques pièces anglaises que, facilement, prétendait-elle, je pourrais approprier au théâtre français.

Il en résultait que, comme la cour des Fontaines était à la fois proche de mon bureau, où j’étais, comme je l’ai dit, forcé d’aller tous les soirs, et du passage Véro-Dodat, où demeurait mon ami Thibaut, chez lequel j’allais tous les jours, je m’arrêtais de temps en temps cour des Fontaines.

Mes trois nouvelles achevées, je les donnai à lire à madame Setier.

Madame Setier, indulgente comme une femme, trouva mes nouvelles charmantes, et obtint de son mari qu’il les imprimerait de compte à demi.

L’impression des nouvelles, tirées à mille exemplaires, — je croyais qu’on n’en tirerait jamais un assez grand nombre, — l’impression des nouvelles devait, comme frais, monter à six cents francs.

Moyennant trois cents francs, M. Setier consentait à les imprimer. Il faisait le reste des frais, c’est-à-dire les trois cents autres francs. Il rentrait d’abord dans ses trois cents francs ; puis, rentré dans ses trois cents francs, nous partagions les bénéfices par moitié.

Voilà pourquoi je demandais à Porcher trois cents francs, que Porcher me prêta, à valoir sur mes prochains billets d’auteur.

Je portai mes trois cents francs chez M. Setier, je déposai mon manuscrit, et, le surlendemain, j’eus la joie de corriger mes épreuves.