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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Je regardai Porcher : c’était la seconde fois qu’il prononçait ce nom à propos duquel Rousseau m’avait fait une si instante recommandation.

— Pourquoi faire, connaître Mélesville ? hasardai-je timidement.

— Mais pour travailler avec lui, donc ! Si vous travailliez avec Mélesville, vous seriez lancé.

Je regardai Porcher.

— Écoutez, monsieur, lui dis-je, je serais désespéré que ce que je vais vous dire pût vous déplaire.

— Oh ! oh ! me répliqua Porcher, est-ce que ce que vous avez à me dire serait du mal de M. Mélesville ?

— Non, monsieur, Dieu m’en garde ! Je n’ai vu M. Mélesville qu’une fois ou deux, je crois, du moins : un homme de trente-cinq ans, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Brun, mince ?

— Oui.

— Souriant toujours ?

— Oui.

— Des dents magnifiques ?

— C’est cela.

— Eh bien, M. Mélesville est un homme d’infiniment d’esprit.

— Je crois bien !

— Mais j’ai une prétention.

— Laquelle ?

— C’est, d’ici à un an ou deux, d’arriver seul.

— Où cela ?

— Au Théâtre-Français.

— Ah ! ah !… mauvaise affaire !

— Le Théâtre-Français ?

— Oui.

— Pour qui ?

— Pour moi.

— Comment, pour vous ?

— Oui ; vous ne vous doutez pas des difficultés qu’ils font