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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Mon père, lui dit Alexandre en lui tendant la main, venez et traitez-moi en homme, et non en empereur.

Le prêtre s’approcha du lit, reçut la confession impériale, donna les sacrements à l’auguste malade.

Vers deux heures, l’empereur éprouva un redoublement de douleur.

— Oh ! s’écria-t-il vaincu par l’angoisse, serait-il vrai, mon Dieu ! que les rois souffrent plus pour mourir que les autres hommes ?…

Pendant la nuit, l’empereur perdit connaissance.

Toute la journée du 28, l’empereur demeura dans un état de léthargie complète.

Le 29, il revint à lui, et un instant on conçut quelque espoir.

L’impératrice veillait auprès de son lit, elle avait vu l’empereur s’endormir un peu avant le crépuscule.

Vers neuf heures du matin seulement, il se réveilla.

Un moment auparavant, le soleil était sorti des nuages, et brillait comme aux plus beaux jours d’été.

Alexandre, en ouvrant les yeux, se trouva tout inondé par ses rayons.

— Comme il fait beau ! s’écria-t-il avec cette joie qu’éprouvent toujours les mourants à revoir le soleil.

Puis, se retournant vers l’impératrice :

— Vous devez être bien fatiguée, madame, dit-il en lui baisant la main.

Et il retomba dans le même affaissement dont il était momentanément sorti.

Le 30, tout espoir s’évanouit.

Cependant, vers deux heures du matin, le général Diébitch parla d’un vieillard, nommé Alexandrovitch, qui avait, disait-il, sauvé plusieurs Tatars de cette même fièvre dont était atteint l’empereur.

Le docteur Wylie exigea qu’on allât chercher ce vieillard à l’instant même.

Vers les huit heures, le vieillard entra.

Il regarda l’empereur, secoua la tête, et dit :