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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

sur la Turquie : une partie de la petite Tartarie, la Crimée, la Bessarabie, le littoral de la mer Noire, le protectorat de la Serbie, de la Moldavie, de la Valachie ; — sur la Perse : la Géorgie, Tiflis, Érivan, une partie de la Circassie ; — sur l’Amérique : les îles Aleutiennes, et la partie nord-ouest du continent septentrional de l’archipel Saint-Lazare.

De l’autre côté de la mer Noire, elle regarde la Turquie qu’elle s’apprête à envahir, aussitôt que la France et l’Angleterre lui en donneront la permission.

Puis, si un jour elle s’adjoint la Suède, ce qui est probable, elle fermera le détroit du Sund à l’occident, le détroit des Dardanelles à l’orient, et nul ne pénétrera plus qu’à son plaisir dans la mer Noire et dans la Baltique, ces deux grands miroirs qui réfléchissent déjà, l’un Odessa, l’autre Pétersbourg.

En attendant, sa plus grande longueur est de trois mille huit cent lieues ; sa plus grande largeur est de quatorze cents lieues.

Sur toute cette étendue, que nous a-t-elle pris à nous ?

Pas un pouce de terrain !

Elle compte soixante et dix millions d’habitants. Sur toute cette population, que nous a-t-elle pris à nous ?

Pas une âme !

Le 24 juin 1807, le général d’artillerie Lariboissière avait fait établir sur le Niémen un radeau, et, sur ce radeau, un pavillon.

Le 25, à une heure de l’après-midi, l’empereur Napoléon, accompagné du grand-duc de Berg, Murat, des maréchaux Berthier et Bessières, du général Duroc et du grand écuyer Caulaincourt, quitta la rive gauche du fleuve pour se rendre au pavillon préparé.

En même temps, l’empereur Alexandre, accompagné du grand-duc Constantin, du général en chef Benigsen, du prince Labanof, du général Ouvarov et de l’aide de camp général comte de Liéven, quitta la rive droite.

Les deux bateaux abordèrent en même temps, chacun de son côté, le radeau.

Les deux empereurs mirent le pied sur l’île flottante, mar-