Page:Dumas - Mes mémoires, tome 4.djvu/14

Cette page a été validée par deux contributeurs.
11
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

soutenait la couronne au-dessus de la tête du vieux duc de Sudermanie, lequel faisait son intérim de roi.

Bernadotte reçut les fugitifs ; comme les eût reçus son compatriote Henri IV.

Une halte dramatique de trois mois eut lieu dans cette Suède, notre ancienne alliée, qui devait, sous un roi français, devenir notre ennemie.

Puis on partit pour Stralsund, où l’on demeura quinze jours. La veille du départ, M. de Camps ; officier d’ordonnance de Bernadotte, vint trouver mademoiselle Georges.

Hermione allait être utilisée dominé courrier d’ambassade.

M. de Camps apportait une lettre de Bernadotte : elle était adressée à Jérôme-Napoléon, roi de Westphalie.

Cette lettre était de la plus haute importance ; on ne savait où la cacher.

Les femmes ne sont jamais embarrassées pour cacher une lettre. Hermione cacha la lettre de Bernadotte dans la gaine de son busc.

La gaine de leur busc, c’est le fourreau de sabre des femmes.

M. de Camps se retira médiocrement rassuré ; on tirait si facilement le sabre du fourreau, à cette époque-là.

L’ambassadrice partit dans une voiture donnée par le prince royal.

Elle portait sur ses genoux une cassette qui renfermait pour trois cent mille francs de diamants.

On ne secoue pas trois couronnes sans qu’il en tombe quelque chose.

Diamants dans la cassette, lettre dans le busc, arrivèrent sans accident jusqu’à deux journées de Cassel, capitale du nouveau royaume de Westphalie.

On voyageait nuit et jour.

La lettre était si pressée, les diamants avaient si grand’peur !

Tout à coup, au milieu de la nuit, on entendit un grand bruit de chevaux, et l’on vit briller une forêt de lances.