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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! fit-il alors ; mais il est trop tard maintenant… Est-il donc possible que vous ne m’ayez pas entendu ?

— Non, milord ; mais essayez encore une fois de me faire connaître vos volontés.

— impossible !… impossible !… murmura le malade ; il est trop tard… tout est fini !… Et cependant… approche… approche… Fletcher !… je vais essayer…

Et il redoubla d’efforts, mais tout fut inutile, et il ne prononça plus que des mots entrecoupés, comme : « Ma femme !… mon enfant !… ma sœur !… Vous savez tout… vous direz tout… vous connaissez mes intentions… » Le reste était inintelligible.

On était au 18, et il était midi.

Les médecins eurent une nouvelle consultation, et décidèrent de donner au malade du quinquina dans du vin.

Il n’avait pris, depuis huit jours, comme je l’ai dit, qu’un peu de bouillon et deux cuillerées d’arrow-root.

Il prit son quinquina, et manifesta l’intention de dormir, par signes ; il ne parlait plus sans être interrogé.

— Voulez-vous que j’aille chercher M. Parry ? lui demanda Fletcher.

— Oui, allez le chercher, répondit-il.

Un instant après, le valet de chambre revint avec lui.

M. Parry se pencha sur son lit ; Byron le reconnut et s’agita.

— Tranquillisez-vous, lui dit M. Parry.

Le malade versa quelques larmes, et parut s’endormir.

C’était le commencement d’une léthargie qui dura près de vingt-quatre heures.

Cependant, vers les huit heures du soir, il s’agita, et Fletcher entendit ces mots, les derniers que prononça Byron :

— Et, maintenant, il faut dormir…

Puis sa tête retomba immobile sur l’oreiller.

Pendant près de vingt-quatre heures, il ne fit pas un seul mouvement ; seulement, par moments, il avait des suffocations et une espèce de râle.

Fletcher appela alors Tita pour qu’elle l’aidât à soulever la