était jeté dans le monde littéraire de l’époque, appelait Désaugiers, Béranger et Armand Gouffé ses amis, faisait de jolies chansons, et, comme s’il fût né riche, il savait tirer une pièce d’or de son gousset, et la laisser négligemment tomber en payement du moindre objet qu’il avait acheté.
Un pareil fashionable ne pouvait coucher dans l’arrière-boutique de son père ; on nous emprunta, pour Auguste, une chambre que nous cédâmes bien volontiers, et Auguste fut installé chez nous.
On comprend que, avide de nouveautés comme je l’étais, je dus rechercher un semblable modèle.
Je fis des avances à Auguste, que ma mère m’offrait, d’ailleurs, pour exemple. Auguste les accueillit et m’offrit, commé la chose qui pouvait m’être le plus agréable, une grande partie de marette.
J’acceptai. — J’avais jusque-là reconnu la supériorité d’Auguste en toute chose ; mais, en fait de marette, j’espérais bien lui damer le pion.
Je me trompais. Nous faisions, nous autres paysans, de la marette en artistes ; Auguste en faisait en grand seigneur.
Il fit venir Boudoux.
— Quelles sont les meilleures marettes de la forêt ? lui demanda-t-il.
— Les mares du chemin de Compiègne et du chemin de Vivières, répondit nettement Boudoux.
— Combien d’autres marettes dans les environs de celle-là, à une lieue à peu près ?
— Sept ou huit.
— En bouchant toutes les autres mares, trois ou quatre jours d’avance, les oiseaux seront obligés d’aller aux deux mares du chemin de Vivières et du chemin de Compiègne ?
— Sans doute, pauvres petites bêtes, à moins qu’il ne pleuve ; auquel cas, au lieu de se déranger, comme vous comprenez bien, elles boiront dans le creux des feuilles.
— Et croyez-vous qu’il pleuve, Boudoux ?
Boudoux secoua la tête.
— Le baromètre de ma tante est au beau fixe, monsieur Auguste ; il ne pleuvra pas jusqu’au changement de lune.