— Mais, enfin, commandez quelque chose, monsieur Choron.
— Va me chercher deux bouteilles de tisane à la cave, et détache-moi Rocador.
Le facteur, qui, chaque matin, buvait en passant la goutte avec Choron, prit la clef, descendit à la cave, tira deux bouteilles de vin blanc, alla détacher Rocador, et rentra.
Il trouva Choron assis devant une table et écrivant.
— Voilà, dit le facteur.
— C’est bien, mon ami, fit Choron ; pose les deux bouteilles sur la table de nuit, et va-t’en à tes affaires.
— Mais, monsieur Choron, insista le facteur, dites-moi au moins comment la chose est arrivée ?
Choron réfléchit un instant ; puis, à demi-voix :
— En effet, murmura-t-il, il n’y a pas de mal à ce qu’on le sache.
Et, se retournant vers lui :
— Quand je t’aurai tout dit, t’en iras-tu ?
— Oui, monsieur Choron.
Alors il lui raconta la chose, comme disait le facteur, dans tous ses détails.
— Et, à présent que tu sais ce que tu voulais savoir, va-t’en.
— Vous le voulez donc ?
— Oui.
— Absolument ?
— Oui.
— Eh bien, alors, au revoir.
— Adieu.
Et le facteur était parti, espérant au fond du cœur que Choron était blessé moins dangereusement qu’il ne le disait ; car comment, à la vue d’un tel sang-froid et d’une telle tranquillité, penser que l’homme qui les conserve est frappé à mort ?
Ce qui se passa après le départ du facteur, personne ne le sait. À cette lutte de l’homme contre la mort, agonie sombre et solitaire, personne n’a assisté.
Seulement, selon toute probabilité, Choron avait bu ce qui