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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS
» Parvenus, au milieu de quelques coups de fusil qui balayaient les rues adjacentes, au bout de la rue Aubry-le-Boucher, d’où l’on aperçoit le numéro 30 de la rue Saint-Martin, nous vîmes que l’on pouvait approcher.
» Nous étions justement arrivés entre deux attaques.
» Nous en profitâmes pour pénétrer jusqu’à la barricade ; elle venait d’être abandonnée.
» Tout se concentrait dans la maison no 30 : attaque et défense.
» Nous montâmes chez un herboriste, et, de derrière les guirlandes d’herbes pendues à sa fenêtre, nous assistâmes à la prise de la maison no 30.
» L’artillerie arriva.
» Te figures-tu ma situation ? Je tremblais que mon frère Victor, capitaine à Vincennes, ne fût parmi les artilleurs.
» Quand je te verrai, je te raconterai ce que nous avons vu.
« Enfin !…
» Nous quittâmes la rue à six heures et demie seulement.
« Je revins au Vaudeville ; j’y trouvai Savary ; il t’avait rencontré, m’a-t-il dit, chez Laffitte, et, là, vous aviez parlé tous les deux à mon frère François.
» Je reçois un mot de Germain Sarrut, qui me prévient qu’un mandat d’amener est lancé contre moi.
» À toi,
» Étienne Arago. »
Je n’étais pas trop rassuré sur mon propre compte : j’avais été vu et reconnu en artilleur par tout le boulevard ; j’avais distribué des armes à la Porte-Saint-Martin ; enfin, je savais qu’au mois de décembre de l’année précédente, une dénonciation contre moi avait été adressée au roi.
Cette dénonciation, chose étrange ! s’est retrouvée, en 1848, dans les papiers de Louis-Philippe, et est tombée entre les mains d’un de ces amis inconnus dont je parle si souvent, et à qui je suis si reconnaissant de leur amitié.