Page:Dumas - Mes mémoires, tome 1.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.
203
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Oui, madame, répondit Hippolyte.

Le soir, ma mère trouva effectivement les pots dans la cuisine, mais empilés les uns sur les autres, afin de prendre le moins de place possible sur les terres de Marie.

Une sueur froide perla au front de ma pauvre mère, car elle comprenait tout.

Hippolyte avait obéi à la lettre. Il avait vidé les fleurs et rentré les pots.

Les fleurs brisées, entassées les unes sur les autres et toutes brillantes de gelée, furent retrouvées le lendemain au pied du mur.

On appela Pierre, leur médecin. Pierre en sauva quelques-unes ; mais la plus grande partie se trouva perdue.

Le second fait est plus grave. Je l’avais offert à Alcide Tousez, pour qu’il le plaçât dans la Sœur de Jocrisse ; mais il n’osa l’utiliser.

J’avais un charmant petit friquet que Pierre avait attrapé. Le pauvre petit, volant à peine, avait voulu s’aventurer comme Icare à suivre son père, et était passé de son nid dans une cage, où il avait grossi et où son aile avait pris tout le développement nécessaire.

C’était Hippolyte qui était chargé spécialement de donner du grain à mon friquet et de nettoyer la cage.

Un jour, je trouvai la cage ouverte et mon friquet disparu.

De là, cris, douleurs, trépignements, et enfin intervention maternelle.

— Qui a laissé cette porte ouverte ? demanda ma mère à Hippolyte.

— C’est moi, madame, répondit celui-ci, joyeux comme s’il avait fait l’action la plus adroite du monde.

— Et pourquoi cela ?

— Dame ! pauvre petite bête, sa cage sentait le renfermé.

Il n’y avait rien à répondre à cela. Ma mère n’ouvrait-elle pas elle-même les fenêtres et les portes des chambres qui sentaient le renfermé, et ne recommandait-elle pas aux domestiques d’en faire autant en pareille circonstance ?

On me donna un autre friquet, et l’on enjoignit à Hippo-