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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

qu’à cette heure, puisque, tout mourant que je suis, il me reste encore assez de force pour dénoncer au monde une série de traitements tels, que les peuples les moins civilisés rougiraient de les faire souffrir à leurs plus cruels ennemis.

» Fait au quartier général de l’armée d’observation du Midi, à Florence, le 15 germinal an ix de la République.

» Alex. Dumas. »


XV


Mon père est échangé contre le général Mack. — Ce qui s’était passé pendant sa captivité. — Il demande en vain à être compris dans la répartition des cinq cent mille francs d’indemnité accordés aux prisonniers. — L’arriéré de sa solde lui est également refusé. — On le met en non-activité, malgré ses énergiques réclamations.

Mon père venait d’être échangé contre le fameux général Mack, prêté par l’empereur d’Autriche aux Napolitains, le même qui plus tard devait, pour la troisième fois, être repris à Ulm, et sur lequel on fit ce quatrain :

En loyauté comme en vaillance,
Mack est un homme singulier :
Retenu sur parole, il s’échappe de France ;
Libre dans Ulm, il se rend prisonnier.

Pendant la captivité de mon père, qui avait duré du 27 ventôse an vii (17 mars 1799) au 15 germinal an ix (5 avril 1801), de grands événements s’étaient passés.

Bonaparte, après avoir échoué devant Saint-Jean-d’Acre, voyant ses projets gigantesques sur l’Orient échouer devant une bicoque, Bonaparte, sans nouvelles d’Europe depuis dix mois, apprend tout à coup par une gazette égarée nos revers d’Italie, la reprise de Mantoue, la bataille de Novi, la mort de Joubert ; il quitte l’Égypte, arrive à Fréjus, après une traversée de quarante jours à bord de la Muiron, arrive à Paris le