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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

vous que je suis pauvre, et que je laisse en France une femme et un enfant.

» Salut et fraternité.
» Alex. Dumas. »

Cette lettre, imprimée officiellement dans la correspondance de l’armée d’Égypte, fit, au milieu de certaines accusations qui pesaient sur certains chefs, un très-grand effet. Reproduite par les journaux de New-York et de Philadelphie, elle eut un si grand succès au milieu de cette république naissante, que, cinquante ans après, dans un voyage que je fis, appelé en Hollande par le jeune roi à propos de son couronnement, l’honorable M. d’Areysas, ministre des États-Unis à la Haye, me la répéta mot pour mot.


XIII


Révolte du Caire. — Mon père entre à cheval dans la grande mosquée. — Sa nostalgie. — Il quitte l’Égypte et aborde à Naples. — Ferdinand et Caroline de Naples. — Emma Lyons et Nelson. — Manifeste de Ferdinand. — Commentaire de son ministre Belmonte-Pignatelli.

Cependant ce défaut de numéraire, dont se plaignait Bonaparte, se faisait sentir de plus en plus. On ne savait plus comment on pourrait payer l’armée sans recourir aux avances. C’était un moyen odieux qui eût rappelé le mode de perception de ces fameux mamelouks qu’on était, disait-on, venu punir enfin de leurs vols et de leurs déprédations. Il était donc impossible d’y avoir recours. Dans cet embarras, Poussielgue, l’administrateur général des finances, proposa au général en chef d’établir le droit d’enregistrement sur toutes les concessions de propriétés qui s’étaient faites depuis l’arrivée en Égypte, ou qui se feraient à l’avenir. Toutes ces concessions étant temporaires, et pouvant être retirées ou renouvelées selon le caprice du général en chef, la ressource était incalculable.

Ce moyen fiscal, inconnu jusqu’alors en Orient, fut consi-